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Roy Lichtenstein, un des maîtres du Pop Art

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Jusqu’à l’âge de 37 ans, Roy était un artiste raté : son studio était rempli de toiles que personne ne voulait acheter. Il se désespérait dans son métier de professeur d’art car il ne voyait rien venir. Mais le déclic vint de son fils qui le mit sur la piste qui fera sa gloire et sa fortune !

Par André Girod

A quoi mesure-t-on la valeur intrinsèque  d’un artiste ? La popularité de son travail ? Le prix de ses œuvres ? La course effrénée des grands musées à en posséder ? Comment  est venue la gloire de Picasso quand, à ses débuts, il était tellement dénié, et comment juger le patrimoine d’un artiste quand il n’a jamais vendu un tableau au cours de sa carrière comme Van Gogh ?

Alors que dire d’un peintre que Life Magazine avait qualifié comme «  the worst artist in America », le pire artiste en Amérique ? A présent, ses tableaux se trouvent dans de nombreux musées et il est célébré comme un grand artiste.

La grandeur d’un artiste est aléatoire, souvent due au hasard et à l’engouement d’un mécène qui n’hésite pas à sortir de l’argent pour l’acquisition des œuvres. Si le tableau est vendu cher, c’est qu’il est exceptionnel d’où une grande considération pour le peintre.

C’est un peu ce qui s’est passé pour Roy Lichtenstein.

Surtout quand on apprend la façon dont il s’est dirigé vers cette branche artistique : la peinture. D’après la légende et ce qui est confirmé par ses biographes, son fils lui a lancé un défi vers 1960: «  I bet you can’t paint as good as that, eh Dad ? » ( Je parie que tu ne peux peindre aussi bien que ça, hein Papa ?) et le gamin malicieux montrait du doigt un dessin de Mickey !

Jusqu’à l’âge de 37 ans, Roy était un artiste raté : son studio était rempli de toiles que personne ne voulait acheter. Il se désespérait dans son métier de professeur d’art car il ne voyait rien venir. Mais le déclic vint de son fils qui le mit sur la piste qui fera sa gloire et sa fortune !

Le gant était ramassé et le père montra à son moutard qu’il pouvait peinturlurer comme Disney. Ce fut son premier tableau :  » Look Mickey « . Evidemment on ne peut que rester coi devant une telle source d’inspiration : Mickey, la souris aux grandes oreilles, qui servait de muse et de modèle à celui qui deviendrait l’un des peintres les plus remarqués du 20 e siècle ! On aurait pu avoir la remarque à l’envers : le père qui encourage son marmot à s’intéresser au dessin en croquant une copie de son journal illustré !

Mais dans ce monde complètement déboussolé qu’est celui de l’art, où l’extravagance vestimentaire du personnage vaut au début autant que la qualité de son coup de main ou l’hallucination de son esprit, le nouvel artiste doit innover pour se faire repérer. Que pouvait faire Roy Lichtenstein ? D’abord un style qui le séparait des autres. Comme il avait trouvé passionnant d’imiter un dessin de bandes dessinées, pourquoi ne pas continuer tout en y apportant des touches bien personnelles. Il garde le concept du contour précis que l’on trouve chez Walt Disney. Pour surligner les contours il ajoute un trait noir gras qui sépare bien les zones colorées.

Il essaie de l’expliquer :

«  Abstract Impressionnists put things on the canvas and responded to what they have done to the color positions and size. My style looks completely different but the nature of putting down lines pretty much is the same. Mine don’t come out looking calligraphic like Pollock’s or Kline’s. »

( La traduction mérite quelques explications : on peut faire du mot à mot et interpréter ce qui est dit mais le résultat manque de lumière. C’est cet éclaircissement qui doit être mis en avant : « Les Impressionnistes abstraits ont mis des choses sur la toile et ont répondu à ce qu’ils ont fait de la position et de la taille des couleurs. Mon style est complètement différent mais la nature de mettre des lignes est à peu près la même. Les miennes ( lignes) n’apparaissent pas comme celles calligraphiques de Pollock ou de Kline. »)

Que veut dire Roy ? Les artistes ont souvent tendance à fournir des modes d’emploi de leurs œuvres bien après leur réussite comme s’ils voulaient se justifier et en même temps se distinguer des autres. Ces rétrospectives sur le travail des années précédentes apportent souvent la confusion dans l’esprit des observateurs et des critiques.  C’est ce que fait Roy ! Quand on jette un œil curieux sur ses explications, on en sort avec un sentiment mitigé : c’est d’une banalité quand il parle de lignes pas comme celles de … puis de «  choses » , de couleurs ! C’est le minimum explicatif qu’il peut donner.

En réalité tous les artistes modernes sont en mal de donner des explications. Roy n’échappe pas à la règle. Il le dit lui-même :

«  In fact I don’t think artists like myself have the faintest idea what they’re doing but we try to put in words that sound logical. »

( En fait, je pense que les artistes comme moi n’ont pas la moindre idée de ce qu’ils font, mais nous essayons de le dire en mots qui semblent logiques.)

 Mais lignes, couleurs, traits noirs ne suffisent pas encore pour trouver son unicité sinon sa … gloire ! Il ajoute le style japonais : dessin très raffiné, à la bordure ferme, sans nuances de formes ou d’ombres. L’exemple est montré dans le tableau : «  Drowning Girl, 1963 ». Les mouvements d’eau rappellent « la vague » (1833) de Katsushika Hokusaï (1760-1849).Cette œuvre a inspiré les contours des bandes dessinées. Mais il faut encore approfondir. L’idée lui vient du «  Pointillisme » : mettre un fond de pointillés mais l’efficacité américaine entre en jeu.

Pas comme Paul Signac ou Georges Seurat qui avaient le temps et la patience de piquer chaque point avec un pinceau sur la toile. Roy a compris qu’il doit utiliser une autre méthode, plus rapide, plus régulière et plus industrielle.

Il applique le «  Ben-Day dots » !  Quel nom barbare, un de ces idiomes américains ! Le  » Ben-Day dots  »  (inventé par Benjamin Day), est un procédé d’imprimerie qui consiste à mettre sur papier une série de points. Des calques spéciaux sont vendus et ils s’appliquent sur toile, papier, matériau de toutes sortes. On passe un pinceau de couleur et le tour est joué. Le système « Lichtenstein » marche puisque ses toiles s’arrachent à des prix inattendus.

Sa première exposition a lieu à la «  Leo Castelli Gallery » New York. Toutes les œuvres sont vendues avant même l’ouverture de l’exposition !!! Alors l’imagination et la technique de Roy se sont transformées en poule aux œufs d’or. En 1989, sa «  Drowning Girl » s’est vendue pour 5,5 millions de dollars, «  In the Car », 16 millions en 2005 et en 2010, «  Alright » pour 42 millions !

Ses parodies de « comics » ( bandes dessinées) deviennent un art à part dans le monde de l’art contemporain. Il se place dans ce monde mystérieux assez souvent  incompréhensif pour les néophytes qu’est devenu l’art contemporain moderne.

Le Pop Art représenté par Andy et Roy a un bel avenir devant lui.

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