Si l’aspect du Grand Canyon a des connotations à caractère féminin comme nous l’avons vu dans l’article sur le Grand Canyon, l’approche de Monument Valley ressemblerait plus à un panorama d’attributs masculins. Le site se voit donc de très loin car se dressent au-dessus de la plaine dégagée de toute verdure, d’immenses rochers phalliques, restes d’un vaste plateau de centaines de mètres d’épaisseur.
Par André Girod
Nous avons donc dans la visite successive de ces deux parcs, le côté négatif et le côté positif d’une photographie. Les deux reliefs sont indissociables, comme si l’un pouvait s’emboîter dans l’autre. Une union presque parfaite dans la formation de la terre, le souterrain, l’abîme que l’on ne peut observer que depuis les lèvres supérieures du canyon et la montée en puissance telles des tours élancées de cathédrales de ces roches qui en fusion ont été poussées vers le ciel par une puissance divine pour les uns et par des vérins telluriques pour les autres. Telle pourrait être l’image que l’on pourrait retenir de ces deux parcs.
Comme pour les Hopis, si proches de la terre que tout partait d’elle et revenait vers elle, les Navajos ont aussi utilisé des symboles sexuels pour parler de ces énormes rochers. Leur héros dont nous avons parlé avec le Grand Canyon est appelé KOKOPELLI, le dieu de la fertilité. C’est un joueur de flûte, bossu dont le surnom était le « Casanova, source de la conception ». Il est souvent représenté avec un gigantesque pénis qu’il peut détacher de son corps et planter ça et là pour fertiliser les vierges. La nuit, il attire par le chant harmonieux de sa flûte les jeunes filles qu’il féconde et abandonne le matin. La journée il féconde les champs avec ses graines.
Ces obélisques de pierre sont le symbole de « healthy maleness » ( d’une masculinité saine). « The women welcome him » est le début d’un chant navajo. Grâce à lui il y a union sacrée entre « mother earth » et « sky ». Au Monument Valley , les damoiselles ont de quoi être heureuses !
Donc depuis des dizaines de kilomètres, au bout d’une route droite comme un rail illimité, sur l’horizon se dressent d’énormes piliers de calcaire ou de granit qui ressembleraient à des vestiges de temple grec. Fiers, arrogants, ces monuments montrent la force de leur ténacité à résister au vent, à la pluie. Ils tendent leurs moignons vers le ciel et forment une palissade, certes abattue à certains endroits mais encore aussi solide que la muraille de Chine.
Pour profiter amplement de ce site exceptionnel que John Wayne et John Ford ont célébré dans de nombreux films, il faut partir au lever du soleil et parcourir en voiture, à pieds ou même à cheval les multiples chemins de terre qui sillonnent le parc en s’enlaçant autour des buttes et des aiguilles de granit. Pendant la journée, le soleil joue à cache-cache avec les nuages et éclairent de nuances différentes les parois des rochers. Vous verrez peut-être un troupeau de chèvres qui a du mal à trouver de quoi manger, des chevaux laissés à l’abandon. Vous reviendrez à l’hôtel couvert de poussière car les pistes ne sont pas goudronnées, le visage brûlé par le soleil mais vous aurez visité un endroit que l’on ne peut trouver plus éloigné de toute civilisation. Le ruban de goudron aurait en effet donné une mauvaise image à cet endroit sauvage. C’est le cœur d’une nature en pleine évolution, une œuvre sculptée par le temps et les éléments déchaînes.
Pour être au cœur du spectacle de ce soleil qui dans un dernier éblouissement, illuminera les monuments, séjournez dans l’hôtel Gouldings. Hors saison, il y a de la place, les chambres sont agréables et ont vue directe sur les roches, au coût de 50 euros pour la chambre.
Et le soir dans certainement la plus petite salle de cinéma aux Etats-Unis ( trente places) vous pourrez voir gratuitement un film de John Wayne. Ce soir c’était les » Searchers« .