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Grand Canyon – La Montagne Inversée

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Depuis sa « découverte » par les explorateurs européens (Garcia Lopez de Càrdenas, 1540), le Grand Canyon a toujours fasciné les visiteurs qui le voient pour la première fois. C’est ce dit John Muir dont nous avons parlé dans un article précédent. Le paysage est non seulement grandiose mais apparaît comme appartenant à une autre planète.

Par André Girod

« No matter how far you have wandered, the Grand Canyon of the Colorado will seem as unearthly in the color and grandeur and quantity of its architecture, as if we had found it after death on some other star. » John Muir 1898.

Depuis sa découverte  par les « Blancs » ( Garcia Lopez de Càrdenas, 1540), le Grand Canyon a toujours fasciné les visiteurs qui le voient pour la première fois. C’est ce que dit John Muir dont nous avons parlé dans un article précédent. Le paysage est non seulement grandiose mais apparaît comme appartenant à une autre planète.

Mais avant de parvenir au bord de cette gigantesque crevasse, le parcours depuis Williams sur la Hwy 89 puis 160, est monotone et décevant. La route interminable va suivre le ventre ondulé de la plaine, étendue aride couverte de courtes touffes d’herbe comme un fin duvet. Puis presqu’à l’entrée du parc, en bout du plateau, apparaît comme une toison d’arbustes chétifs aux branches rêches et aux troncs tordus. Alors file devant le touriste une ligne sinueuse jusqu’à l’horizon qui semble se dérober constamment. Quelques virages éloignés les uns des autres apportent un nouveau monticule qui se dissipe bien vite. L’arrivée dans le parc, au milieu d’une forêt de mélèzes ne donne aucune indication du spectacle grandiose qui nous attend.

 

Une guérite tenue par un ranger en chapeau de la police canadienne monte la garde à l’entrée sud du parc. Pour les nouveaux venus, c’est le meilleur accès au Grand Canyon. Il y a un parcours au nord mais il est très fortement déconseillé car il ne donne pas la vue du sud. Encore quelques kilomètres sur un plat consternant car on se demande pourquoi ce site est si connu.

La chaussée qui taille sa voie à travers la végétation dense et touffue donne l’impression de la trace d’une caresse d’amant qui nous guide vers le plus impénétrable mystère de la terre, notre mère, la plus profonde intimité de la femme.

Si cette approche semble être véritablement sensuelle, presqu’érotique, c’est que le Grand Canyon, lorsqu’il surgit brutalement aux yeux du visiteur, se découvre comme la plus incroyable crevasse, la plus étonnante fente de notre mère planète. Ses couleurs, sa profondeur, sa sensualité dans les formes et dans les nuances avec comme point culminant, le Temple de Shiva, clitoris sculpté de pierre qui trône en son centre, aurait pu inspirer Gustave Courbet pour la composition de son œuvre : « Origine du monde ».

Les Indiens Hopi ne s’y sont pas trompés : ils appelaient le Grand Canyon, le Sipapu, la large crevasse dans le sol pour laisser passer l’eau. Dans leurs chambres cérémoniales ( Kiva), ils creusaient au centre du plancher un trou comme une vulve par lequelle sortaient tous les êtres humains venant d’un monde souterrain. C’était l’orifice de la naissance et de l’origine du monde. Kokopelli (équivalent de notre cigogne) alors apportaient les enfants à naître aux femmes Hopi. Car le Grand Canyon avec ses multiples couches géologiques nous donne un aperçu formidable de ce qui fut la formation de la terre, c’est à dire sa naissance.

Le contraste est d’autant plus surprenant lorsque vous allez voir après «  Monument Valley ».

En effet le profil du plateau et l’arrivée sur la Grand Canyon a un côté découverte féminine. Vous débouchez sur un des points qui domine le Grand Canyon. Mather Point est le premier à vous faire plonger dans l’immense canyon et vous en êtes tout bouleversé. Pour reprendre les mots de John Muir, vous êtes d’abord frappé par la taille : près de deux kilomètres de profondeur, 30 de large et 400 de long, il est sans aucun doute la plus belle plaie de la terre laissée par un fleuve. Une superposition de couches de rochers de multiples couleurs avec des étages qui s’empilent comme un centre ville vu d’avion.

L’architecture dont parle John est digne d’un architecte dément qui n’aurait pas su arrêter son imagination. Du matin jusqu’au soir, la palette de couleurs ne cesse de s’étaler sur les flancs du Canyon, s’étendant du rouge au brun sombre en passant par toutes les variétés de violet et de jaune. Jamais on ne peut voir le canyon sous les mêmes couleurs. Ce qui surprend l’auteur malgré ses nombreuses visites au Grand Canyon, c’est l’harmonie des formes et des couleurs qui donne à longueur de journée un magnifique concert de sons et une incroyable palette de couleurs. On ne s’en lasse jamais et le retour vers cette splendeur de la nature est toujours attendu avec une joie presque  enfantine, tout comme Noël et ses lumières.

Mais pour véritablement admirer cette immense sculpture créée pour les uns par Dieu et pour les autres, plus réalistes, par la percée du Colorado que l’on aperçoit tout au fond comme une souple couleuvre verte qui se fraie un chemin au milieu des «boulders », ces énormes rochers qui ont chuté du haut des parois verticales et ont formé des rapides des plus dangereux, il faut se rendre à « Desert view ». Quand un homme aussi intrépide que Powell, ancien militaire qui avait perdu un bras à la guerre, s’élança, accompagné d’une poignée d’aventuriers, sur de rudimentaires barques dans le lit du Colorado, sur une distance de près de trois cents kilomètres, il ignorait ce qui l’attendait. Trois de ses compagnons, effrayés par les premiers rapides, abandonnèrent l’expédition sans demander leur reste.

Passer quelque temps dans le Grand Canyon est un enchantement permanent car les possibilités de l’explorer sont multiples.

Le plus simple parcours est évidemment de suivre la route 64 qui entre dans le parc par le sud et ressort par l’est. Environ trente cinq kilomètres de ravissement. Les points d’observation sont clairement indiqués et accessibles aux automobilistes : Logan Point, pour terminer au «  Desert view ». Une tour d’observation construite dans les années vingt permet de dominer toute l’étendue du Canyon et de bien voir le Colorado River.

 

Une autre façon de visiter le Grand Canyon est à dos de mulet. Pendant la saison il est utile de réserver sa mule un an à l’avance tellement le nombre de demandes est grand des quatre coins du monde et petit le contingent de mules autorisées à descendre à «Phantom Ranch », le ranch au bord du Colorado. L’auteur l’a fait et c’est une expérience extraordinaire à condition de ne pas avoir le vertige ou simplement peur. Les mules à la queue leu leu suivent un sentier abrupt qui longe les flancs du canyon. Il a une largeur qui ne dépasse pas un mètre et surplombe des vides de plus de mille mètres sans barrière ! Le mulet est utilisé parce qu’il a un pied plus sûr que le cheval. Mais quelle descente : trois/quatre heures à frôler la paroi à pic et de l’autre côté le vide ! Il y a une étape à mi chemin puis dernière plongée vers la rivière. Le soir, feu de camp avec chansons sous un ciel parfaitement étoilé pris entre deux flancs. Le lendemain remontée vers le haut du canyon, vers la civilisation.

Autre façon de connaître le Grand Canyon : la descente en radeau sur une quarantaine de kilomètres. Là il faut s’accrocher à la corde de sécurité pendant le passage des rapides. Mieux que le meilleur grand huit. Sensations assurées ! Mais pour plus long, il faut compter plusieurs jours avec arrêts dans des criques merveilleuses, près de cascades scintillantes ou des antres profondes à flanc de rochers.

 

Evidemment le tour en hélicoptère ou en avion ( faits aussi par l’auteur) vaut le coup. Il est un peu cher mais on ne va pas au Grand Canyon tous les jours !

 

Enfin pour les bons marcheurs, sur le « Angel Trail », la descente se fait en près de huit heures mais pour la remontée, il vaut prévoir 12 heures. C’est gratuit et le trajet apporte d’innombrables instants inoubliables. L’auteur s’est arrêté à mi chemin !

L’hiver, le Grand Canyon est souvent sous la neige car il est situé à plus de 2 000 mètres d’altitude. Le spectacle est alors aussi unique.

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