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Contestation – les 99% aux Etats-Unis

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En octobre 2011 se lançait un mouvement contestataire né de la crise et de l’écart de plus en plus grand entre riches et pauvres. C’était le conflit entre le 1% ( les plus riches) et les 99%, les autres : pauvres, classe moyenne.

Par André Girod
Le 17 Septembre 2012

Des chiffres étaient jetés sur le tapis de la dispute, voire de la révolution pacifique. Dans ce genre de révolte, les excès étaient évidents car pour alimenter ses arguments, il fallait souvent utiliser de grosses ficelles : les riches sont des rapaces, ils sucent le sang du peuple, ils écrasent de leur mépris la classe ouvrière, ils profitent des lois financières ( impôts) pour s ‘enrichir encore plus, ils ont tous les pouvoirs, économique, financier, politique.

Et à présent, où sont les «  streeters », ceux qui campaient dans le parc Zuccotti, près de Wall Street ? L’idée d’appeler les plus riches le 1% vient  de David Groeber, anthropologue à l’Université de Yale. Il inventa la formule au cours de discussions avec des mécontents qui se rebellaient contre le système économique.

Il est incontestable que les arguments de ce mouvement ont fait tache d’huile et se sont introduits dans la campagne présidentielle américaine. Il y a même un parallèle avec la campagne présidentielle française où une attaque en règle a été menée par le Front de Gauche contre la classe supérieure, les riches. Il est à remarquer comme aux Etats-Unis, ceux qui se sont montrés les plus virulents contre ce 1% n’étaient pas eux-mêmes parmi les plus pauvres mais appartenaient à la classe moyenne supérieure, celle des 10% !

Dans de nombreux essais publiés aux Etats-Unis, le tri entre le grain et l’ivraie a été conduit par des économistes renommés et leurs conclusions sont très nuancées.

Taper sur les riches, est-ce la solution à nos problèmes ? Certains articles réclament la fin des hostilités : «  Stop beating up the rich ! » clame Nina Easton dans le magazine «  Fortune ». Evidemment il ne faut rien attendre de plus de cette revue avec un tel nom ! Mais pour être impartial, écoutons les deux sons de cloche.

L’attaque en règle contre les riches qui est générale dans les pays occidentaux ( Etats-Unis, France, Grèce, Espagne, Italie par exemple) illustre la situation actuelle dans laquelle se trouvent ces pays : effondrement de la classe moyenne, augmentation du chômage, augmentation colossale de la dettedélocalisation des emplois vers les pays émergents, diminution du pouvoir d’achat par des salaires bloqués, des impôts qui montent. La crise qui dure devient insupportable à une grande majorité des citoyens des Etats Unis et des autres pays développés.

Un argument majeur indique que ce genre de réaction n’est pas récent. Au cours de l’Histoire des Etats-Unis, il y a eu semblable manifestation de mécontentement.  F.D. Roosevelt dans les années trente, à la suite de la «  Grande Dépression de 1929 » déclarait à la presse qu’il mangeait un millionnaire cuit à point tous les matins ( «  eating a grilled millionnaire for breakfast »). Et FDR était loin d’être un miséreux avec ses propriétés ! Mais c’était un bon slogan pour se faire réélire et il y a réussi parfaitement. Il avait été aidé en cela avec l’assassinat du Sénateur Huey Long, son plus dangereux rival qui réclamait une limite de revenus pour les riches à UN MILLION de dollars et de garantir un revenu minimum de $2 000 par famille ! Etrange l’histoire ! Elle se répète n’est-ce pas avec la proposition de taxation des plus riches à 75 % du gouvernement Français!

En 1980, le New York Times mettait à la une de son édition : «  A very good time for the very rich » ( Une époque merveilleuse pour les trés riches). Dans l’article incendiaire, le NYT clamait que le 1% des familles américaines les plus riches avaient bénéficié des plus gros gains dans les dix dernières années en ramassant 60% de la richesse du pays. Bill Clinton sauta sur le chariot de la révolte et en fit un de ses thèmes de campagne : «  Unfair gains of the rich ». Il était adressé aux «  forgotten middle class » ( aux classes moyennes oubliées).

Nous voyons tout de suite que ce genre de campagne s’est retrouvé en France et a permis à François Hollande d’être élu. Clinton l’emporta haut la main. Il avait gagné car selon le New York Times, il avait tapé à bras raccourcis sur les riches ! ( « One of the few presidential candidates since Truman to woo the middle class by pummeling the rich »)

Une anecdote caractéristique : même dans la mort, les riches ont peur d’être agressés. Se rappeler la mort de Louis XIV dont l’annonce retardée avait pour but d’éviter des émeutes. En 1887, le milliardaire Pullman, le roi des wagons de chemin de fer, a été enterré dans un cercueil de plomb coulé dans du béton de peur que son corps soit mutilé et brûlé comme ce fut le cas des rois de France pendant la Révolution Française.

Toutes les enquêtes menées par divers instituts de recherche aux Etats-Unis reconnaissent que l’écart entre riches et pauvres n’a fait que s’accroître ces trente dernières années : Entre 1970 et 1980, le 1% récoltait 10% de la richesse. En 2007 le 1% ramassait 23% de la richesse !

Alors une question pertinente se pose : qui est qualifié pour être considéré comme membre de ce 1% ? Selon les normes économiques des Etats-Unis, il faut que la personne gagne environ $ 400 000 par an ou qu’il ait un patrimoine supérieur à 8,4 millions de dollars. Si l’on compare aux normes avancées par le gouvernement français actuel, il faut moins en Amérique pour être considéré comme riche qu’en France.

Steven Kaplan, économiste à l’Université de Chicago, atténue cet axiome : l’écart en 2009 est moins grand que pendant la période prospère du deuxième mandat de Bill Clinton. Il faut dire et j’en ai été témoin du fait que pendant le deuxième mandat de Clinton (1997-2001) la prospérité se trouvait à tous les niveaux : classe ouvrière, classe moyenne et évidemment les riches, ceux qui se lançaient dans des entreprises et réussissaient. Ce fut un peu mon cas !   Le chômage était au plus bas, le nombre d’entreprises créées en très nette augmentation.

Depuis, le pourcentage de la «  classe moyenne » aux Etats-Unis a baissé de 61% à 51% pour le Pew Research Center. Mais le pourcentage de riches est passé de 14% à 20%. Un entrepreneur ( tels Mark Zuckerberg avec Facebook, Steve Jobs avec Apple ou Bill Gates avec Microsoft) en mettant ses actions sur le marché de la bourse deviendra un millionnaire même milliardaire.

Pourtant, un grand nombre de ces grands entrepreneurs sont partis de zéro, ont trouvé une innovation, ont travaillé dur à la faire prévaloir et ont collecté le bénéfice de leur audace et de leur vision. Sont-ils pour autant des riches à abattre ? Les économistes américains tous à l’unisson disent que non car en même temps, il s ont créé des milliers d’emplois et contribué au prestige de l’Amérique. Les assommer voudrait dire mettre une fin brutale aux ambitions des jeunes entrepreneurs, décourager les initiatives personnelles et réduire le nombre de créations d’entreprises comme peau de chagrin.

 

Pour ces multiples raisons le mouvement 1% n’a pas fait long feu : il s’est disloqué car ce que désirent plus les Américains que de taxer à mort les riches, c’est d’avoir des opportunités eux aussi, de pouvoir se créer de la richesse en se lançant dans des aventures commerciales ou industrielles. En un mot c’est d’avoir l’occasion de s’enrichir. Ils pensent que ce n’est pas en taxant les riches à 75% que cette manne sortira le pays de la crise. Si ce ne sont eux qui s’enrichissent, ce sera leurs enfants. Alexis de Tocqueville l’avait constaté dés le 18e siècle:  » The love of wealth is at the bottom of all that the Americans do. » (L’amour de la richesse c’est à quoi s’adonnent tous les Américains.) : C’est le fondement du «  rêve américain » !

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