Avant de devenir le 32e parc national des Etats-Unis, en 1964, la région était peu connue en dehors du sud de l’Utah. Seuls quelques chemins de terre permettaient de pénétrer en lisière, la plus grande partie des lieux demeurant inaccessibles.
Le temps et l’érosion ont œuvré pendant quelque 300 millions d’années pour façonner le relief. Mais la plus grande force naturelle, dans ce paysage chaotique aux étonnantes couleurs, reste le Colorado et ses affluents, en particulier la Green River, qui conflue avec le Colorado presque au milieu du parc pour former le fleuve le plus sauvage du continent.
Mordant à même leur lit rocheux, ces deux cours d’eau ont arraché des quantités incalculables de sable et de limon, creusant plus de 160 km de canyons, à près de 800 mètres de profondeur.
Tout d’abord encaissés chacun dans une gorge étroite et tortueuse, bordée de falaises de grès rouges vertigineusement dressées dans l’outremer d’un ciel sans nuages, ils pénètrent ensemble dans Cataract Canyon et entament leur course commune vers la mer en s’engouffrant dans une série de formations rocheuses multicolores, découpées comme au scalpel en formes insolites.
L’attraction la plus populaire de Canyonlands est une promenade guidée en bateau, le long du Colorado ou de la Green River. Le voyage, qui se conclut souvent par une brève descente des impressionnants rapides de Cataract Canyon, s’effectue dans de solides radeaux pneumatiques qui peuvent transporter douze passagers. Chacun reçoit un gilet de sauvetage rouge vif. «Ça permet aux sauveteurs de retrouver les corps plus facilement», déclare un guide pince-sans-rire.
Tandis que le pilote manœuvre l’embarcation secouée par un incessant roulis, les touristes, oubliant leur anxiété, s’extasient sur la beauté sauvage des murailles de pierre qui les entourent, fantastique galerie qui illustre si bien la petitesse de l’homme.
Au sommet des falaises, les hauts plateaux désertiques (2 130 m d’altitude), et leurs mesas semblent privés de vie : les couguars, les coyotes et les lynx qui les habitent ne sortent de leur repaire qu’à la nuit tombée. Le long des rivières, on trouve des castors, des canards et toutes sortes de petits animaux, de plantes et d’arbres qui, pour pallier l’aridité du sol, ont élaboré leurs propres systèmes d’alimentation en eau.
On peut voir par exemple près du lieu-dit « The Neck », un bosquet de sapins de Douglas curieusement serré à l’ombre humide des hautes parois rocheuses et apparemment isolés depuis des milliers d’années de leurs congénères qui boisent la bordure du plateau. Des espèces totalement inconnues de fleurs et d’insectes ont été également découvertes dans la région.
Les meilleurs moments pour visiter le parc sont le printemps et l’automne (les températures peuvent varier de -15 °C en hiver à 43 °C en été).
Canyonlands National Park est divisé en trois districts :
« The Needles » (les Aiguilles), fabuleuse forêt de grès composée de milliers de piliers teintés de rouge et de blanc et d’innombrables blocs posés en équilibre, dont certains atteignent la hauteur d’immeubles de trente étages. En direction de l’ouest, le même grès a pris un aspect totalement différent : il forme des vallées parallèles encaissées dont le lit (quelque 1 500 mètres de roche et de sable accumulés) recouvre 29 couches de sel pur totalisant plus de 900 mètres d’épaisseur.
Au fur et à mesure que l’eau dissout et emporte cette base saline peu stable, des blocs de grès pénètrent dans les espaces libérés, de sorte que le fond du canyon s’enfonce de manière continue.
» The Maze » est le secteur le plus éloigné et le plus difficilement accessible du parc. II faut, pour le visiter, utiliser un véhicule tout terrain (on peut y faire des excursions d’une journée à bord de 4×4 avec chauffeur). « The Maze » (le Labyrinthe) porte bien son nom : il est formé de canyons aux à-pics sinueux et à la topographie confuse. Les ensembles pictographiques que l’on peut y admirer constituent le plus bel exemple d’art lapidaire qu’aient laissé les anciens Indiens d’Amérique du Nord.
« Island in the Sky », dans la portion nord de Canyonlands, c’est la partie du parc la plus facile à visiter. Ce n’en est pourtant pas la moins captivante. Ses imposantes falaises rouges surplombent le cours inextricable de la Green River. Une vision qui, en 1859, inspira au capitaine de cavalerie John Macomb ce jugement sans appel : « Je ne peux imaginer région plus inintéressante ». Les touristes qui affluent aujourd’hui dans ce monde en dehors du monde sont d’un tout autre avis.
Canyonlands National Park se trouve au sud de l’Utah, au sud-est de la ville de Moab.