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A la rencontre des Américains – Rencontres insolites 5

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Au fil de la route, d’autres portraits d’Américains…

 

Jackie : The « Geechie Gal » 
Une visite à faire si vous passez par la Caroline du Sud : Boone Hall Plantation. C’est ce qui reste d’une vaste «Plantation», nom donné à une importante propriété tenue par une famille blanche, à l’époque de l’esclavage. Cette ferme a vu le jour en 1681, ce qui est très vieux pour l’histoire américaine. La terre a été donnée par sa Majesté, le roi d’Angleterre, à John Boone qui venait de débarquer d’un bateau arrivé à ce qui va devenir un grand port du sud : Charleston. Elle est passée entre de nombreuses mains depuis et surtout a été achetée par un prince russe à la fin du 19e siècle. Joueur, dépensier, il a réussi dans sa vie à ruiner ses cinq femmes, toutes femmes riches qu’il avait épousées pour leur argent.

Au cours de la visite, j’ai rencontré une femme remarquable : Jackie, the «Geechie Gal », (storyteller ). Ancienne professeure de gymnastique dans des écoles primaires, elle est la conteuse de la culture «Gulah» dans cette région.La culture « Gulah » est celle des noirs venus de l’Angola, d’où le nom.

Elle raconte avec talent l’histoire des Noirs depuis leur arrivée sur le continent américain comme esclaves. Elle-même descend d’une arrière-grand-mère, qui était esclave mais avait été rendue libre lors de la proclamation de l’émancipation à la fin de la Guerre de Sécession.

A la mort du propriétaire, l’aïeule avait reçu 41 hectares de terre. Comme les propriétaires Blancs, après la guerre, ne pouvaient pas payer les Noirs, ces derniers devinrent des «share croppers», c’est à dire qu’ils recevaient une portion de la récolte qu’ils partageaient.

Née en 1953, Jackie a connu pendant toute sa jeunesse, une discrimination à tous les niveaux : dans les bus, aux toilettes, au cinéma où il y avait une partie « white » et une partie « black».Elle a fini le lycée en 1971 et voulait devenir médecin. Mais elle a eu peur d’être ostracisée à MUSE, la faculté de médecine du coin. Alors elle opta pour l’enseignement. Mais sa sœur de quatre ans plus jeune, a pu devenir dentiste car en ces quatre ans, tout avait changé grâce à des lois fédérales.

Ce qu’il y avait de sublime dans son récit, c’était sa façon de raconter : comme beaucoup de Noirs, elle a un sens de la comédie et du théâtre, un rythme dans son langage, une imagerie due aux traditions dans le partage oral de leur histoire. Un accent qui met tellement en valeur les anecdotes et vous avez une conteuse née. Ses années au théâtre a aussi aidé à lui donner un sens dans ses mouvements et dans ses intonations.

Depuis sa retraite, quatre jours par semaine, elle vient trois fois par jour raconter l’histoire des Noirs en Caroline. Mais elle, dit-elle, fait très attention à ne pas froisser les « Whites » et à ne troubler les « Blacks ». Equilibre précaire entre ce qui reste de discrimination comme le montre le grave incident de Trayvon Martin, un jeune adolescent noir abattu récemment par un blanc. Incident qui bouleverse l’Amérique !

Magnifique heure à écouter une femme née pour être conteuse. Mais pour les Français, il faut parler l’anglais couramment pour apprécier le talent de cette femme noire. Quinze ans à travailler avec les parents et enfants Noirs de Chicago me permet d’apprécier un tel moment.

Bonne continuation à Jackie !



Paul : the pastel artist

Sur la place Kosciusko, héros polonais tué à Savannah durant la révolution, un autre artiste a planté son chevalet : Paul avec ses craies de pastel fait de belles œuvres. Il vient de Buffalo, New York, trois mois par an à Savannah pour vivre l’ambiance de cette ville du Sud.

Paul a fait des études d’art à l’université de Buffalo pour pouvoir enseigner. Mais à la place, il est devenu pompier professionnel à Buffalo. A ses heures perdues, il peignait et commença à remporter des prix locaux puis régionaux. Il fut l’un des premiers peintres à reproduire des scènes d’incendies et à peindre la vie des pompiers.

Ce ne fut qu’un petit pas à franchir lorsqu’il prit sa retraite de consacrer tout son temps à son art mais en illuminant ses toiles de vives couleurs pour montrer la beauté des places de Savannah.

Il est heureux de passer ces quelques semaines, loin du froid du nord, au milieu des parterres d’azalées et sous les branches des chênes débordant de guirlandes de mousse (spanish moss). Belle retraite à se donner du plaisir et à en faire aux autres. Pendant que nous discutions, il a vendu quatre de ses toiles !


Vicci : a beautiful blonde with a talent

Sur la rue du marché (Market street) une petite galerie attire notre regard : elle est tenue par une très jolie femme qui derrière son chevalet, peint des fleurs. Tout sourire, elle nous invite à entrer dans sa boutique pour nous faire admirer ses fleurs surtout ses coquelicots.

C’est Vicci, installée depuis vingt ans à Savannah et reconnue comme l’une des meilleures artistes de la ville. Pour « faire artiste », voire même « artiste française » car nos peintres ont une grande réputation en Amérique, elle a appelé son magasin : « Raffiné galerie ».

Comme nous étions français, elle nous a dit que quelques jours plus tôt, un couple de Français était passé et lui avait fait la remarque qu’elle avait fait une faute d’orthographe à l’intitulé de son titre : il fallait écrire « raffinée», avec un « e » puisque l’adjectif s’appliquait au mot « galerie », féminin.

Légèrement vexée, elle me demanda mon avis. J’étais entré dans le magasin pour admirer les tableaux et non pour faire une leçon de grammaire ! J’avais trouvé l’attitude du couple un peu déplacée et même arrogante, comme peuvent l’être malheureusement beaucoup de Français à l’étranger ! Alors je la rassurai en lui indiquant que le nom de sa galerie correspondait bien à son art : raffiné ! ( sans e) !

Combien de fois je suis passé derrière des Français en Amérique pour réparer les dégâts !
Avec un très beau sourire, elle a promis de regarder l’article sur le site USA-decouverte et je pense qu’elle rira de le lire !

Allez, Vicci, on se revoit en Provence, car elle rêve d’y aller !


Raymond : the palm rose creator
Nous sommes à présent dans la ville de Savannah, Georgia. Dans la vieille ville, magnifique parcours à travers les rues ombragées par des chênes centenaires d’où pendent des guirlandes de mousse, nous rencontrons des artistes en tous genres. Raymond est l’un d’eux. Né et élevé à Savannah, c’est un enfant du sud, avec des grands parents esclaves et lui a connu la discrimination des années soixante : il est Noir. Pendant vingt ans, il a été camionneur et a parcouru tout le pays. Mais un accident de voiture l’a fait se retirer car il s’endormait au volant : il avait la maladie de l’apnée du sommeil qui vous fait perdre conscience pendant quelques secondes.

Alors il s’est recyclé dans la fabrication des roses avec des feuilles de palmier. Ils sont 350 autorisés par la ville à exercer ce métier dans la ville de Savannah. Alors il s’est installé sur un banc près d’une belle fontaine, offerte par la France après la guerre de sécession.

Là il façonne de ses mains des bouquets de roses avec des feuilles de palmiers découpées en lamelles. Il lui faut cinq minutes pour en faire une qu’il vend cinq dollars. Les plus élaborées coûtent dix dollars. Il peut en faire cinquante dans sa journée s’il y a affluence dans le square.

Raymond aura sa retraite de camionneur mais qui ne sera pas élevée, comme celle de Harry.
Nous nous quittons en nous souhaitant « good luck » et je m’éloigne à travers les azalées en pensant à ce que chacun peut faire pour gagner sa vie.


Larry : the mystic landscaper
Il est des instants très particuliers dans les rencontres que nous faisons. Au premier abord, rien n’indique le ton et la direction que va prendre la conversation. Avec Larry, c’est ce qui s’est passé. Installés dans un « booth » de la chaîne de restaurant Dennis à Jacksonville, Floride, ma femme et moi déjeunions tranquillement.

Un homme est venu s’asseoir à la table proche de la nôtre. C’était un habitué puisque tout le monde le saluait. J’ai eu l’impression qu’il voulait parler avec quelqu’un de nouveau. Je ne me suis pas fait prier. Assis en face de lui, nous avons discuté longtemps. De propos étranges d’abord puisque Larry a commencé à parler de la fin du monde qui devrait arriver bientôt, avant la fin de l’année 2012 comme le prédit le calendrier Maya. Puis il a démontré que le croisement elliptique de nombreuses planètes qui doit se produire à ce moment là confirmait ses prédictions.

Alors pour se protéger contre le chaos qui s’ensuivra, il a construit un abri souterrain d’une centaine de mètres carrés près de chez lui et y a stocké de la nourriture pour deux ans, des armes et des munitions, plus de 500 000 cartouches ! Il peut tenir un siège contre des extra terrestres qui envahiraient la terre. D’ailleurs, il portait sur lui un revolver et dans sa camionnette il avait un fusil d’assaut.

Alors qui est Larry ? Depuis plus de vingt ans, il est paysagiste et s’occupe de villas. Il gagne bien sa vie mais reconnait que commencer une telle entreprise aujourd’hui serait plus difficile qu’il y avait vingt ans. Tout a changé pour le pire, répète-t-il, car l’Amérique a perdu de sa prépondérance. Elle n’est plus autant respectée et la situation actuelle accélère la désintégration du pays. Il est conservateur et regrette beaucoup que les Américains aient élu Obama qui n’apporte que la poisse à l’Amérique. Mais, ajoute-t-il, si les Etats-Unis disparaissent comme d’autres civilisations, tous les pays plongeront dans l’apocalypse.

En réalité, Larry est comme un membre des « survivalists », organisation très puissante dans les années soixante pendant la guerre froide où des milices s’étaient créées pour défendre le pays en cas d’invasion. Dans mon livre  » Ilkya « ,  il y a plusieurs chapitres sur ce mouvement.

En fin de compte, on s’est séparés sur une chaude poignée de main, chacun reprenant ses activités. Mais la conversation avait été surréaliste !

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