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Littérature américaine – 3 – Le premier romantisme

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Dés le tournant du 19e siècle, les écrivains américains se détournèrent des problèmes pratiques et immédiats et de la marche du pays, pour se consacrer à des recherches plus spécifiquement littéraires et tenter de se libérer du joug des lettres anglaises. Quelques efforts furent même tentés afin de créer une «langue américaine» mais aucun résultat durable n’apparut, à l’exception des réformes de l’orthographe dues à Noah Webster (1758-1843).

Toute la production littéraire antérieure à la Guerre de Sécession est coulée dans le moule du romantisme: religiosité diffuse, affirmations individualistes, acte de foi en l’homme naturel, culte des sentiments opposés à la sèche raison et à son efficacité; ce sont généralement les traits du romantisme européen, simplifiés cependant, et faisant beaucoup moins de place à des revendications proprement littéraires. Enfin, le romantisme américain est très tardif par rapport au mouvement britannique qu’il ne manquera pas de suivre et, souvent, d’imiter, en dépit de ses déclarations d’indépendance.

II faut faire la part de l’amateurisme dans la littérature américaine des débuts du 19e siècle. Cet amateurisme est le fait des minorités du Sud et de l’Ouest et plus encore do celui des Krtickerbockers new-yorkais. Pendant les trente premières années du 19e siècle, New York deviendra une ville animée et cosmopolite alors que Boston, qui lui ravira plus tard la supériorité intellectuelle, et Philadelphie demeurent des villes provinciales. Cet esprit new-yorkais léger, insouciant et qui tend à considérer la création littéraire comme un divertissement privilégié, sera connu sous le nom de knickerbocker.

 

Washington Irving
Ce nom fut lancé par Wnshington Irving dont le Sketch Book est la plus parfaite expression de ce courant d’esprit. L’auteur ridiculise, non sans humour, les travers politiques de son époque, ou, dans Rip van Winkle dépeint ironiquement les transformations survenues dans la ville.

Mais Washington Irving ne doit pas à ces seuls ouvrages sa renommée internationale et le fait d’être l’un des plus importants des écrivains américains de son temps. II fut aussi un Romantique et, comme tel, exploita une inspiration «nationaliste», c’est-à-dire fondée sur des thèmes propres à l’Amérique. Cependant son raffinement de citadin affaiblit considérablement les thèmes romanesques de la conquête et du «bon sauvage» vivant à l’état de nature avant l’arrivée des blancs.

 

Fenimore Cooper
Fenimore Cooper avait au contraire une force et un souffle qui servirent admirablement la matière de ses romans. Influencé par Walter Scott, il se consacra au roman d’aventures mais ses créations sont typiquement américaines. The PioneersThe Last of the MohicansPath finderne sont certes pas dépourvus de maladresses et les personnages en sont simplifiés mais, outre son talent à décrire, avec un souffle parfois épique, les scènes de chasse ou le monde des indiens, l’auteur du Dernier des Mohicans nous importe surtout par le fait que nombre de ses romans présentent un homme «naturel»Natty Bumppo, qui vivant selon une démarche assez «rousseauiste» sur des terres sauvages, prévoit la destruction de l’environnement par la civilisation.

Cooper manifeste mieux qu’aucun autre à cette époque cette nostalgie mêlée de remords qu’éprouve l’homme blanc devant les restes de la civilisation naturelle. «La destruction des forêts et des animaux est devenue la tare originelle qui pèse de tout son poids sur l’homme américain. Le héros de la frontière est chargé d’assumer les crimes de son peuple mais aussi de le réconcilier avec ses victimes. II est le médiateur et le sauveur», comme le montrent les héros de Cooper.

William Cullen Bryant
Dés ce premier moment du romantisme, deux poètes vont marquer les lettres américaines, très différents par leur nature et par l’audience qu’ils auront tant de leur vivant qu’après leur mort. William Cullen Bryant (1794-1878), par son lyrisme intime et retenu, appartient bien à sa Nouvelle-Angleterre natale. Il voulut écarter une formation livresque et étrangère pour puiser aux sources d’une inspiration purement nationale et immédiate. Son romantisme est fait de sensibilité à des paysages riches pour lui de résonances affectives et d’une religion qui associe l’amour de la nature à la passion humanitaire.

Ce moralisme religieux qui nous rebute aujourd’hui dominait toute cette époque et Bryant est bien de son temps. Ce qu’on a en revanche pu lui reprocher, c’est son manque de souffle, le caractère un peu timoré de sa poésie qui, malgré certaines réussites incontestables, demeure très caractéristique des Knickerbockers.

 

Edgar Poe
Edgar Poe (1809-1849) ouvre déjà un tout autre monde. Etudier l’auteur d’Histoires Extraordinaires ou du poème The Raven (le Corbeau) soulève cependant une difficulté considérable pour les Européens et plus particulièrement pour les Français: cette difficulté consiste à séparer le mythe du personnage réel et de l’oeuvre elle-même.

Si la France célèbre, lit et respecte celui qui fut admiré et traduit par Baudelaire et Mallarmé, entre autres, les Etats-Unis, aujourd’hui encore, reprochent au poète les recherches de sa langue et de sa versification et sont souvent loin d’apprécier ses contes à leur juste valeur. Poe est assurément le premier paria des lettres américaines; il est le «dandy» et le réprouvé que toute société redoute, mais plus encore la société américaine de la première moitié du 19e siècle.

Sa poésie s’oppose à la poésie didactique et moralisante qui régnait de son temps, il refuse aussi bien une poésie du cœur, exclusivement sentimentale, qu’une poésie de la raison, sèche et efficace, au profit d’une poésie de l’«âme», au sens de la psyché. Il s’en explique longuement dans ses écrits critiques et ce n’est pas le moindre de ses mérites que d’être le premier véritable poète et écrivain théoricien des lettres américaines, avec The Philosophy of CompositionThe Poetic Principle et The Rationale of Verse.

Ses contes, dans la tradition du roman gothique anglais ont sur celui-ci l’indéniable supériorité de la composition d’une part, et la profondeur des angoisses et de l’horreur qui les animent. Sans aucune intention sociale, il nie l’optimisme «rousseauiste» de ses compatriotes et laisse entendre que la beauté et la grandeur naturelle d’un pays n’impliquent nullement une beauté et une grandeur d’âme égales chez ses habitants.

Note – découvrez ce magnifique site (anglophone) consacré à Edgar Poe : Knowing Poe

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