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Littérature américaine – 6 – L’aube du 20e siècle

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Une renaissance poétique se lève sur les Etats-Unis vers 1910-1912. Elle a deux pôles : Chicago, où Harriet Monroe fonde le magazine «Poetry», et l’Europe, Londres surtout, où Amy Lowell et Ezra Pound créent le mouvement «imagiste».

C’est Ezra Pound (1885-1972) qui, pour la première fois, employa le terme d’imagiste; puis, en 1914 parut une petite anthologie, Les Imagistes. Mais Ezra Pound abandonna assez vite cette étiquette et, il est difficile, en effet, de faire entrer dans un courant déterminé une personnalité aussi riche et originale. Il fait, malheureusement, partie de ces poètes qu’on admire plus qu’on ne les lit, et ce en raison de la difficulté de ses vers où abondent les réminiscences et les citations empruntées à différentes cultures. C’est pourtant son souffle et son style qui font l’essentiel de son génie. Les thèmes des Cantos et des Pisan Cantos ne sont pas, en eux mêmes, d’une rare originalité mais Pound est sans doute le premier poète américain à avoir découvert et cultivé le pouvoir créateur du langage, à avoir accédé «par et à travers la poésie» (Baudelaire) aux splendeurs situées dans l’histoire et la légende, et au-delà d’elles, dans l’intelligence humaine, et au-delà d’elle.

Amy Lowell (1874-1925) reprit, codifia et finança l’école imagiste. La doctrine réclamait avant tout l’abandon des rhétoriques empruntées ou acquises et «recherchait dans l’image la beauté plastique, l’équilibre des formes, le rapport harmonieux». Il semble donc abusif de comparer ce courant au symbolisme français qui était un art de participation alors que l’imagisme demeurait un art de représentation.

Hilda Doolittle (1886-1961), plus spontanément douée que Amy Lowell, cultiva, non sans succès, une poésie plastique mais sauvée de la froideur parnassienne, grâce à une sensibilité très «impressionniste».

C’est à cette époque que les revues commencent à publier un peu plus abondamment les poètes et que les universités et les collèges les invitent à venir faire des cycles de conférences. Le poète américain n’est ni «maudit» ni réprouvé; il est le plus souvent financièrement aidé par une sorte de bourse nationale ou privée… et ignoré.

Tel ne fut pas le cas de Robert Frost (1874-1963), qui devint une véritable gloire nationale ce qui, assurément, ne pouvait advenir à Ezra Pound. Poète de la nature, qui excelle dans des notations précises et «pittoresques», Frost est aussi un lyrique intimiste qui chante les joies d’une humanité moyenne mais jamais ne s’interroge sur les prérogatives propres au verbe poétique.

Parmi les œuvres diffusées par Harriet Monroe, dans «Poetry», celle de Carl Sandburg est certainement la plus américaine. Ses Chicago Poems exaltent «la grande charcutière de l’univers» et sa population d’expatriés misérables, et Good Morning America! attaque la pudibonderie puritaine et les complicités de la politique et de la finance.